Je n’ai pas la prétention de détenir la connaissance ultime en construction de deck. Mais je peux partager avec vous quelques bases solides pour sublimer vos decks et améliorer leur stabilité, qu’ils soient en 60 ou 100 cartes.
Les notions que nous allons aborder ici (et dans les prochains articles) sont nombreuses. Mon objectif est de rester concis et de vous donner des repères pratiques, sans vous noyer dans les détails.
Qu’est ce qu’un bon deck
Pour moi, un bon deck n’est pas forcément une pile de staples à 50 €, ni un deck qui gagne tout le temps. Il s’agit avant tout d’un deck capable de faire ce qu’il doit faire, et de le faire de manière régulière.
Plus on réduit la variance, plus on augmente la régularité. Et moins on subit la frustration d’une mauvaise pioche. Résultat : le plaisir de jeu est constant.
Exemple concret :
Dans un deck mono-vert en 60 cartes, je veux jouer mes sorts « tour 3 » dès le tour 2 pour prendre l’initiative.
- Avec un seul Elfe de Llanowar, j’ai 14,18 % de chances de l’avoir en main de départ, soit environ une fois toutes les 7 parties.
- Avec quatre exemplaires, cette probabilité passe à 56,7 %, soit environ une fois toutes les 1,7 parties.
- Si j’ajoute quatre Elfes mystiques (même effet que l’Elfe de Llanowar), mes chances théoriques dépassent 100 %. En pratique, je suis quasiment certain d’avoir un accélérateur de mana en main de départ, ce qui me permet de réaliser mon plan : jouer mes sorts de tour 3 dès le tour 2.


Évidemment, ce sont des statistiques : rien ne garantit que vos huit elfes ne finiront pas au fond du deck. Mais elles donnent un excellent indicateur de régularité.
Avoir un plan de jeu clair
Votre deck doit avoir un plan de jeu clair. Évitez de vous disperser.
Si une carte synergise avec votre plan « A » mais ouvre également un plan « X », mieux vaut ne pas l’intégrer. Elle risque de détourner vos ressources de votre stratégie principale.
Exemple :
Dans un deck Aristocrats, le plan consiste à sacrifier des créatures pour infliger des dégâts à l’adversaire avec :
- Artiste de sang
- Surineur de Zulaport


Il pourrait être tentant d’ajouter Frère de bande d’Ajani, mais cette carte favorise un autre plan : le point de vie et agression. Ce plan disperse vos ressources et détourne le deck de son essence.

Même si la synergie semble intéressante, elle n’apporte rien à la stratégie principale : ici, le sacrifice.
Ajouter des cartes qui ne renforcent qu’un plan secondaire serait donc une erreur.
Conseils pratiques pour débuter
Commencez avec ce que vous possédez. Pas besoin d’acheter toutes les cartes dès la première version du deck. Dans la plupart des cas, vous serez déçu : manque de synergie, coût trop élevé, ou stratégie inefficace en pratique.
Il est souvent plus efficace de faire tourner un deck avec des cartes « moyennes » mais bien choisies pour leur synergie, plutôt qu’avec des cartes puissantes mais isolées.
Mais qu’y a-t-il dans un deck ?
Sans informations précises sur votre deck, partons d’une hypothèse simple : environ 40 % de terrains. Ce chiffre sera à ajuster selon le coût moyen des cartes et le plan de jeu (objet du prochain article 😉).
Réservez ensuite une part importante à votre plan de jeu principal : minimum 22 %, idéalement 30 %. Pour commencer, 26 % est un bon repère.
Ajoutez enfin des briques indispensables pour gérer certaines menaces :
- 3 à 6 % de protection (défense talismanique, indestructible, prévention des blessures, contresorts…)
- 3 à 10 % de gestion de créatures
- 3 à 10 % de gestion de cimetières
- 3 à 10 % de gestion d’enchantements
- 3 à 10 % de gestion d’artefacts
Petit problème : ces pourcentages s’additionnent entre 77 % et 126 %. Trop peu ou trop. Il faut donc optimiser.
La clé : choisir des cartes qui remplissent plusieurs fonctions à la fois.
Optimisation possible n°1 : la polyvalence brute
Utiliser des cartes qui ont de multiples fonctionnalités.
Exemples :


Ces cartes remplissent plusieurs rôles de gestion en une seule place et s’intègrent facilement dans n’importe quel deck jouant ces couleurs.
Optimisation possible n°2 : la synergie
Autre exemple : un deck tribal elfes.

- Seule, c’est une créature moyenne.
- Mais dans un deck elfes, elle déclenche d’autres capacités d’arrivée (Avant-garde elfe) et profite des boosts tribaux (Archidruide elfe).
- Elle ne remplace pas directement une carte de plan de jeu principal, mais elle renforce la cohérence du deck en remplaçant une carte de gestion classique.
Le même principe s’applique à tous les archétypes : dans un deck enchantement, privilégiez la gestion via des enchantements ; dans un deck artefact, via des artefacts ; dans un deck chat, via des chats… vous avez compris.
Attention à l’anti-synergie
Ne mettez pas de destruction de masse dans un deck basé sur les créatures. L’argument « oui, mais ça m’a fait gagner une fois » ne tient pas.
Combien de fois cette carte est-elle restée morte dans votre main ? Combien de fois aurait-il été plus utile de piocher une carte adaptée à votre plan de jeu ?
Personne n’a envie de jouer Esprit du labyrinthe dans un deck Morska, détective sous-marin. Toute carte que vous jugez « bonne si je perds » est en réalité une mauvaise carte.


Le plan B
Le plan B est un sous-thème présent dans votre plan de jeu initial. Il n’a pas vocation à être dominant, mais dans certaines parties, il peut prendre le dessus et vous sauver la mise.
Exemple concret :
En duel commander, si votre commandant est Le Dieu Scarabée, et que votre plan principal consiste à réanimer les créatures des cimetières, vous serez en grande difficulté face à Dennick, apprenti pieu. Dans ce cas, sans plan B, la partie est quasiment injouable.


Mais si votre deck contient un sous-thème zombie (création et synergies autour des tokens zombies) ou un axe secondaire basé sur la meule (faire défausser ou envoyer les cartes adverses au cimetière), vous avez encore des chances de vous en sortir.
Un plan B est donc aussi essentiel que le plan principal doit rester cohérent. Attention toutefois à ne pas s’éparpiller : votre deck doit rester construit autour du plan A. Une carte doit intégrer votre deck avant tout parce qu’elle renforce le plan A. Si elle soutient également le plan B, tant mieux. Mais si elle ne sert que le plan B, alors c’est une mauvaise carte.
Comment intégrer le plan B ?
Pour les joueurs de decks 100 cartes (Commander), référez-vous au paragraphe « Optimisation n°2 » : l’idée est d’intégrer des cartes polyvalentes, cohérentes avec le plan A mais capables de soutenir un plan B.
Pour les joueurs de decks 60 cartes (formats compétitifs / tournois en boutique), la solution, c’est le sideboard !
Et ce n’est pas pour rien que les matchs se jouent en BO3 ou BO5. Ces fameuses 15 cartes « en dehors de la partie » (pour citer certains puissant Eldrazi) ont 4 fonctions principales :
- Rendre votre plan A encore plus fort et écrasant.
- Protéger votre plan A contre certains archétypes.
- Empêcher vos adversaires d’exécuter leur plan A.
- Ou même transformer votre deck pour le faire passer du plan A au plan B.
Un dernier mot clef : l’Adaptation
Adaptez toujours votre deck à votre groupe de jeu, que ce soit en termes de niveau ou de plan de jeu.
Par exemple :
- Si personne ne joue la réanimation de cimetière dans votre groupe, remplacez ces cartes par des options plus pertinentes.
- Si personne ne joue d’artefacts, vous pouvez enlever les cartes de gestion d’artefacts
Le principe est simple : construisez votre deck pour qu’il soit efficace face aux situations que vous rencontrerez réellement.
Si votre objectif est la détente et non le compétitif, inutile de vouloir systématiquement détruire les plans de jeu adverses, si vous le faite cela peu nuire grandement au fun de la table et décourager certains joueurs de refaire des parties avec vous.
Lorsque vous construisez un deck, posez-vous cette question essentielle :
« Est-ce que je veux jouer avec mes adversaires, ou contre mes adversaires ? »
Cette réflexion simple guide toutes vos décisions : choix des cartes, synergies, plan B et sideboard.
Conclusion
Construire un deck, ce n’est pas juste empiler les cartes les plus puissantes : c’est créer un outil cohérent et régulier, capable de réaliser votre plan de jeu tout en restant flexible face aux imprévus. Un bon deck repose sur un plan clair, des synergies solides, une optimisation intelligente et un plan B bien pensé. L’adaptation à votre groupe de jeu et aux situations rencontrées reste essentielle pour profiter pleinement de chaque partie.
En appliquant ces principes, chaque deck devient plus qu’une simple collection de cartes : il devient un instrument de stratégie, de créativité et de plaisir. Prenez vos cartes, testez vos idées, ajustez vos choix et observez vos decks prendre vie. Chaque partie devient une occasion d’apprendre, de s’améliorer et de vraiment profiter du jeu. Votre prochain deck ne se contentera pas de jouer… il jouera pour vous.
Jonathan – Mage de l’Emporium du D.20
« Quand votre deck prend vie, chaque carte devient une arme »
